Extension de la protection due à la salariée de retour de congé maternité : L’interdiction des « mesures préparatoires au licenciement »


Il n’est pas toujours évident pour une salariée d’avoir l’esprit tranquille lorsqu’elle quitte temporairement son poste au sein d’une entreprise pour partir en congé de maternité.

En effet, si heureux est l’évènement attendu par la future maman, il arrive parfois que l’employeur ne partage pas tout à fait ce sentiment.
   
A l’heure où l’égalité professionnelle (prévue pour 2186 selon le Forum économique mondial…) est au cœur du débat politique, la tendance actuelle semble s’orienter en faveur d’une protection renforcée du statut de la salariée avant, pendant et après son congé de maternité.

L’état du droit

Le Code du travail fait interdiction à l’employeur de licencier une salariée :
-Lorsque l’état de grossesse est médicalement constaté ;
-Pendant toute la durée du congé de maternité ;
-Pendant les dix semaines suivant l’expiration du congé de maternité.

Précisons au passage que c’est la loi « Travail » du 8 août 2016 qui a étendu la période de protection postérieure à l’issue du congé maternité, la faisant passer de 4 à 10 semaines. Au demeurant, cela permet de constater qu’à bien y chercher, cette loi comporte certaines mesures protectrices des salariés susceptibles d’échapper à la vindicte populaire.

Dans le cas où la salariée déciderait de prendre des congés payés immédiatement après la fin de son congé de maternité, la période de protection de 10 semaines commencerait alors à courir à l’expiration des congés payés.

L’interdiction de licencier est cependant écartée lorsque le licenciement est prononcé au motif d’une faute grave commise par la salariée, non liée à l’état de grossesse, ou de l’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement (sachant que des difficultés économiques, en dehors de la fermeture de l’entreprise ne caractérisent généralement pas cette impossibilité).

Si l’employeur outrepasse cette interdiction, la salariée est fondée à demander la nullité du licenciement, assortie, si elle le souhaite, de sa réintégration dans l’entreprise ainsi que le paiement de l’ensemble des salaires qui auraient du lui être versés entre son licenciement et sa réintégration. Si la salariée ne souhaite pas être réintégrée, elle peut alors prétendre à des dommages et intérêts.

La durée de la période de protection restant cependant limitée dans le temps, certains employeurs ont pu être tentés d’attendre la fin de la période de protection pour licencier la jeune maman, tout en préparant son éviction durant ladite période.

La jurisprudence a donc été amenée à statuer sur ces cas pour déterminer si un licenciement prononcé postérieurement à la période de protection pouvait encourir la nullité pour violation des règles protectrice du statut de la salariée en situation de maternité, en raison d’actes préparatoires commis durant cette période.

La réponse est positive. La Cour de cassation, faisant écho à la jurisprudence européenne en la matière, a considéré pour la première fois en 2010 que les « mesures préparatoires » prises par l’employeur pendant la période de protection de la salariée, entraîne la nullité du licenciement prononcé après la fin de cette période (Cass. soc., 15 sept. 2010, n°08-43.299).

Cette jurisprudence tend à s’affirmer, puisqu’elle a récemment été confirmée.



L’arrêt du 1er février 2017

Par un arrêt rendu le 1er février 2017, la Cour de cassation vient de nouveau affirmer qu’il est interdit à l’employeur, non seulement de notifier un licenciement pendant la période de protection prévue par la loi, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision (Cass. soc., 1er février 2017, n°15-26.250).

Le principe semble donc aujourd’hui clair. Une interrogation de taille demeure pourtant : Que doit-on entendre par « mesures préparatoires ».

A ce stade, les deux arrêts précités ont seulement confirmé que constituent des mesures préparatoires :
L’embauche définitive d’un salarié pour remplacer la salariée de retour de de congé maternité ;
L’information donnée à la salariée, pendant la période de protection, de son licenciement économique à venir et l’examen des modalités de celui-ci.

De manière plus générale, il semblerait que la nullité soit encourue dès lors que la décision de licenciement a été prise et préparée pendant le congé.  

Il faudra cependant attendre un développement de la jurisprudence en la matière pour mieux appréhender cette notion de mesures préparatoires.


Tristan Aubry-Infernoso


18 avril 2017