Période d’essai : attention à ne pas « réévaluer » un salarié déjà connu


La période d’essai permet à l’employeur d’apprécier les compétences d’un salarié fraîchement recruté, et au salarié de vérifier que le poste lui convient (C. trav., art. L. 1221-20).

Durant cette phase, la rupture du contrat est facilitée : elle peut intervenir sans motif ni indemnité.

Encore faut-il que la finalité de la période d’essai soit respectée. Autrement dit, si l’employeur a déjà eu l’occasion d’évaluer les compétences professionnelles de l’intéressé, la période d’essai est détournée de son objet et sa rupture s’analyse alors en un licenciement, lequel est nécessairement privé de cause réelle et sérieuse puisqu’il n’aura pas été motivé.

C’est ce que rappelle un arrêt de la Cour de cassation du 29 avril 2025 (n° 23-22.389).

Dans cette affaire, une agente commerciale avait d’abord collaboré pendant 9 mois avec une entreprise en tant qu’auto-entrepreneuse.

Puis la collaboration s’était poursuivie sous la forme d’un contrat de travail pour un poste d’« agenceuse vendeuse », contrat de travail que l’employeur avait cru pouvoir assortir d’une période d’essai de deux mois.

L’employeur avait ensuite mis fin au contrat pendant cette période d’essai, ce que contestait la salariée, estimant que cette période d’essai n’était pas justifiée, car l’employeur avait déjà pu apprécier ses qualités professionnelles lorsqu’elle était auto-entrepreneuse, avant la conclusion du contrat de travail, pour les mêmes fonctions et le même emploi.

Ce raisonnement est approuvé par les juges, qui requalifient en conséquence la rupture en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La Cour rappelle que la finalité de la période d’essai est d’évaluer les capacités professionnelles du salarié dans le poste visé. Si cette appréciation a pu être faite dans le cadre d’une relation professionnelle antérieure, quelle qu’en soit la forme, la période d’essai devient sans objet, et l’employeur qui croyait rompre une période d’essai sans avoir à justifier d’un motif se trouve avoir prononcé un licenciement abusif.

Me Manuel Dambrin


14 juin 2025