RGPD : Le droit d’accès du salarié aux mails professionnels


On sait que l’employeur n’a pas accès aux mails d’un salarié lorsque ceux-ci sont échangés depuis son adresse mail personnelle. Mais qu’en est-il de l’accès du salarié à ses mails professionnels ?

Autrement dit, l’employeur peut-il refuser à un salarié l’accès aux courriels qu’il a échangés dans le cadre de sa messagerie professionnelle au motif que ces e-mails n’auraient rien de « personnel » car relevant d’une activité purement professionnelle ?

La question, au cœur de bien des contentieux prud’homaux, a reçu une réponse de la Cour de cassation, dans un arrêt publié du 18 juin 2025 (n° 23-19022).

Un salarié licencié pour faute – en l’occurrence pour des propos et comportements sexistes – avait saisi la juridiction prud’homale pour contester la régularité de son licenciement et de sa convention de forfait-jours. À cette occasion, il avait demandé à son ancien employeur de lui communiquer les données personnelles le concernant, conformément au droit d’accès prévu par l’article 15 du RGPD. Sa demande visait notamment l’ensemble des courriels échangés pendant l’exécution de son contrat de travail via sa messagerie professionnelle.

L’employeur s’était exécuté partiellement, en transmettant divers documents contractuels, médicaux ou administratifs, mais avait refusé de communiquer les e-mails sollicités, qui étaient manifestement destinés à alimenter une demande d’heures supplémentaires.

Deux arguments étaient avancés par l’employeur : d’une part, les e-mails en question n’étaient pas des données personnelles, puisqu’ils relevaient strictement de la sphère professionnelle ; d’autre part, le salarié ne pouvait se plaindre dès lors qu’un « bon nombre d’éléments » lui avaient déjà été transmis.

Ces arguments n’ont pas convaincu les juges. La cour d’appel d’abord, puis la Cour de cassation, sanctionnent l’employeur pour manquement à son obligation de répondre pleinement à la demande d’accès. La Haute juridiction rappelle que les courriels émis ou reçus par un salarié depuis sa messagerie professionnelle sont des données à caractère personnel, dès lors qu’ils permettent de l’identifier, directement ou indirectement. À ce titre, ils entrent dans le champ du droit d’accès prévu par le RGPD. L’employeur doit donc permettre au salarié d’accéder tant au contenu de ces messages qu’aux métadonnées associées (horodatage, destinataires), sauf à justifier d’une atteinte aux droits ou libertés d’autrui – ce qui n’était pas allégué en l’espèce.

Pour autant, le salarié ne peut exiger une remise brute de tous les courriels. La Cour de cassation, suivant la position de la CNIL, précise que le droit d’accès ne porte pas nécessairement sur la copie des e-mails eux-mêmes, mais sur les données personnelles qu’ils contiennent. La communication peut donc prendre la forme d’un relevé structuré, par exemple un tableau récapitulatif mentionnant les éléments personnels figurant dans les courriels concernés. L’essentiel est que l’objectif du droit d’accès soit respecté : permettre à la personne concernée de prendre connaissance, de façon intelligible, des données collectées et traitées à son sujet.

Me Manuel Dambrin


02 juillet 2025