Faute grave : il ne suffit pas d’agir à temps… il faut agir vite

Le droit disciplinaire est ponctué de règles strictes. La plus connue est sans doute la fameuse prescription des deux mois posée par l’article L. 1332-4 du code du travail : l’employeur ne peut plus sanctionner un fait fautif dont il a eu connaissance plus de deux mois avant l’engagement de la procédure disciplinaire, laquelle se matérialise par l’envoi de la convocation à l’entretien préalable.
Mais, en matière de faute grave — c’est-à-dire lorsque l’employeur entend licencier un salarié sans préavis ni indemnité de licenciement — il ne lui suffit pas de respecter ce délai : il lui faut agir bien plus vite.
C’est ce que vient rappeler la Cour de cassation dans son arrêt du 27 mai 2025 (n° 24-16.119).
La salariée, assistante de direction dans une clinique privée, avait été licenciée pour faute grave le 5 décembre 2019. Les griefs qui lui étaient reprochés avaient été identifiés à l’occasion d’un contrôle réalisé le 11 octobre : elle aurait abusé d’une délégation de pouvoir temporaire pour contourner les règles internes de contrôle du temps de travail.
Or, la procédure disciplinaire n’avait été engagée que le 21 novembre, soit près de six semaines après la découverte des faits.
La salariée contestait donc la qualification de faute grave, arguant que ce délai était incompatible avec l’urgence exigée pour ce type de rupture. La cour d’appel écartait l’argument et validait le licenciement — mais la Cour de cassation ne fut pas de cet avis.
La Haute juridiction cassa l’arrêt d’appel ; elle rappela la règle selon laquelle : « la mise en œuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits allégués, dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire ».
On ne peut pas crier à la gravité… et traîner les pieds.
Me Manuel Dambrin
21 juillet 2025