Activités sociales et culturelles du CSE : l’égalité plus forte que l’ancienneté


Les « activités sociales et culturelles » (ASC) du comité social et économique (CSE) constituent la part conviviale de la représentation du personnel. Places de cinéma, colonies de vacances, chèques-cadeaux, participation aux loisirs ou à la garde d’enfants : autant de prestations offertes aux salariés et à leurs familles, qui peuvent être exonérées de cotisations sociales. Ces avantages sont financés par une subvention spécifique de l’employeur, dont le montant est fixé par rapport à la masse salariale de l’entreprise.

Depuis longtemps, de nombreux CSE réservaient certaines prestations aux salariés justifiant d’une ancienneté minimale — une manière de récompenser un certain ancrage dans l’entreprise. Mais la Cour de cassation, Chambre sociale, a rappelé, dans deux arrêts récents, que le CSE ne peut exiger une certaine ancienneté comme condition au bénéfice des activités sociales et culturelles.

Dans un premier arrêt du 3 avril 2024 (n° 22-16.812, publié au Bulletin), le litige opposait le syndicat CGT de Groupama au CSE de Groupama assurances mutuelles. Le CSE avait instauré, dans son règlement, un délai de carence de six mois avant de permettre aux nouveaux embauchés de bénéficier des ASC. La cour d’appel de Paris avait validé cette mesure, y voyant un critère objectif appliqué à tous et destiné à éviter « l’effet d’aubaine ». La Cour de cassation a cassé cette décision : selon elle, « l’ouverture du droit de l’ensemble des salariés et des stagiaires au sein de l’entreprise à bénéficier des activités sociales et culturelles ne saurait être subordonnée à une condition d’ancienneté »

La même logique a prévalu dans un arrêt du 12 mars 2025 (n° 23-21.223). Trois salariés et le syndicat CFDT avaient saisi le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence contre le CSE de l’établissement Géant Casino. Le comité avait attribué des bons cadeaux de 170 € aux salariés ayant au moins six mois de présence effective, tandis que les autres ne recevaient que 150 €. Le tribunal avait jugé la discrimination inexistante ; la Cour de cassation, elle, a censuré de nouveau ce raisonnement.

Ces décisions marquent un tournant pratique : les CSE doivent supprimer les conditions d’ancienneté avant le 31 décembre 2025, sous peine, à partir du 1ᵉʳ janvier 2026, de perdre le bénéfice des exonérations sociales.

Autrement dit, le « cadeau » fiscal pourrait bien se transformer en redressement si le comité persiste à confondre fidélité et égalité.

Me Manuel Dambrin


05 novembre 2025