La loyauté ne connaît pas de congé


Selon l’article L. 1222-1 du Code du travail, « le contrat de travail est exécuté de bonne foi ». De ce principe, la jurisprudence a déduit une obligation de loyauté, inhérente à tout contrat de travail et s’imposant aussi bien au salarié qu’à l’employeur.

Le mérite de l’arrêt rendu le 1er octobre 2025 par la Cour de cassation (n° 24-17.418) est de rappeler que cette obligation persiste pendant la suspension du contrat de travail, notamment en cas d’arrêt maladie.

Dans l’affaire à l’origine de cette décision, un peintre en bâtiment, chef d’équipe au sein de la société David & Davitech, avait été placé en arrêt maladie à compter du 15 janvier 2018. Il profita de cette période pour proposer ses services, à titre personnel, à l’un des clients de son employeur : travaux de bardage, garde-corps, petite maçonnerie… des prestations très semblables à celles réalisées par son employeur.

Informée de la démarche, celle-ci y vit une trahison caractérisée et engagea une procédure de licenciement pour faute grave.

Le salarié contesta la rupture de son contrat de travail en faisant valoir que son initiative ne s’était pas concrétisée : le client approché avait décliné sa proposition. Il s’agissait, selon lui, d’un simple projet futur, non d’une concurrence effective. Dès lors, aucune faute grave ne pouvait lui être reprochée pendant la suspension de son contrat de travail.

L’employeur, de son côté, soutenait qu’un arrêt maladie ne suspend pas l’obligation de loyauté : démarcher un client pendant cette période revenait à agir contre les intérêts de l’entreprise, quelle qu’en soit l’issue.

Le conseil de prud’hommes de Bordeaux donna raison à l’employeur ; la cour d’appel confirma ; le salarié forma un pourvoi en cassation ; la chambre sociale de la Cour de cassation le rejeta.

La Haute juridiction considéra que le salarié, en proposant ses services à un client de l’entreprise pour une activité concurrente, avait manqué à son obligation de loyauté, laquelle subsiste pendant la suspension du contrat. Ce manquement rendait impossible son maintien dans l’entreprise et justifiait un licenciement pour faute grave, sans indemnité ni préavis.

Me Manuel Dambrin


10 novembre 2025