De la pizza à Tahiti


Un bailleur loue un local commercial à une société qui exploite un commerce vendant des pizzas à emporter.

Le propriétaire de la pizzeria s’avise que le local loué a été construit sans permis de construire et se fonde sur l’irrégularité de la situation administrative pour cesser de régler ses loyers (tout en continuant à exploiter son commerce), assigner le bailleur en résolution du bail et solliciter la réparation des préjudices causés par cette situation.

La Cour d’appel de Papeete a rejeté sa demande au motif que l’absence de permis de construire ne l’avait pas empêché d’exploiter son commerce. Il faut préciser qu’un commerce de pizzeria était exploité dans les lieux depuis plusieurs années et que l’administration locale ne s’était jamais émue de la situation.

La 3ème chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 1er juin 2022 (n° 21-11.602) a cassé cet arrêt sur le fondement de l’article 1719 du code civil.

Aux termes de cet article, « le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’une stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ».

Cette solution ne peut qu’être approuvée, dans la mesure où, ainsi que l’ont relevé aussi bien la Cour de cassation que la Cour d’appel, le permis de construire ne pouvant pas être régularisé, son absence rendait difficile l’assurance des locaux, interdisait tout développement du commerce, constituait un obstacle à la cession du fonds de commerce et, surtout, faisait peser un risque sérieux de perte du local en cas de « réveil » de l’administration et d’injonction de démolir les lieux loués.

La chose louée doit pouvoir être utilisée à l’usage auquel elle est destinée : le terrain agricole utilisé à un usage agricole, le restaurant disposer des autorisations administratives permettant son exploitation, etc.

C’est le bon sens et il était utile de le rappeler.

Me Xavier Chabeuf


18 septembre 2022