Un testament doit être rédigé dans une langue comprise par son rédacteur
Enoncé ainsi, la portée de l’arrêt rendu le 9 juin 2021 par la Cour de cassation (1ère chambre civile, n° 19-21.770) semble frappée au coin de l’évidence.
Pour autant, ce n’en était pas vraiment une, car l’article 970 du code civil prévoit seulement que le testament olographe doit être rédigé, daté et signé par le testateur : « il n’est assujetti à aucune autre forme ».
Il n’est pas exigé qu’il soit rédigé en langue française, par exemple. Si l’article 2, aliéna 1er, de la Constitution, prévoit que la langue de la République est le français, cela ne vaut que dans les rapports avec les administrations publiques et n’interdit pas l’utilisation d’une langue étrangère en France (comme cela se pratique fréquemment d’ailleurs dans le monde des affaires).
D’ailleurs, l’arrêt ici évoqué est un arrêt de cassation, laquelle a censuré un arrêt rendu par la Cour d’appel de Chambéry qui avait eu à connaître de la situation d’un ressortissant allemand vivant en France mais non francophone. Il avait rédigé son testament en langue française accompagné d’une notice d’explication rédigée, elle, en allemand.
La question qui se posait n’était pas celle de la langue utilisée mais celle du plein et valable consentement à un acte juridique emportant des conséquences considérables.
Pour la Cour d’appel de Chambéry, la présence d’un document annexe explicitant en allemand le contenu du testament rédigé en français, sans le trahir, permettait de considérer que le rédacteur avait bien compris la portée de l’acte et que son consentement suffisamment éclairé pour être valable.
Pour la Cour de cassation, en revanche, le fait que le testament ait été rédigé dans une langue non comprise par son rédacteur constituait un obstacle à son consentement, nonobstant la présence de la notice explicative rédigée en allemand.
Cette solution doit être approuvée : recopier à la main un texte que l’on ne comprend pas ne satisfait pas aux exigences de la loi.
Les notaires le savent bien d’ailleurs, qui prennent la précaution, sans que cela ne soit obligatoire, de solliciter la présence d’un traducteur assermenté lorsque le testateur n’est pas francophone.
Quant à la présence d’un notice explicative rédigée dans la langue comprise du rédacteur, elle ne peut que poser des difficultés supplémentaires : comment, en effet, s’assurer qu’elle a bien été rédigée en même temps que le testament, qu’elle a été soumise au rédacteur qui en a compris le sens, et qu’elle n’a pas été rédigée a posteriori ?
Ce type de testament olographe est bien souvent présenté par son bénéficiaire comme au cas de l’arrêt ici commenté, où le testament faisait de la sœur du rédacteur la légataire de la quotité disponible.
On peut douter, parfois, de l’authenticité d’un testament opportunément retrouvé par une personne qui est la première intéressée par sa prise en compte.
Il est d’autant plus impératif que le testament traduise, par lui-même, la volonté du défunt.
Me Xavier Chabeuf
22 novembre 2021