La situation des juridictions en période de confinement


Comme l’ensemble de l’activité économique et des administrations, la justice est lourdement affectée par les mesures de confinement ordonnées par le Gouvernement.

En résumé, toutes les procédures sont suspendues, hormis celles qui revêtent une urgence toute particulière.

Il faut donc s’attendre à un phénomène d’engorgement des juridictions lorsque le confinement prendra fin et à un rallongement significatif de délais de procédure, lesquels étaient déjà singulièrement affectés par les sous-effectifs et les pénuries de moyens judiciaires et par les mouvements sociaux liés à la réforme des retraites.

Rien n’empêche cependant, bien au contraire, de préparer des actes de procédure pendant la période de confinement, dès à présent.

Petit inventaire de la situation dans les différentes juridictions (sources : Ordre des avocats au Barreau de Paris) :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS

En raison de la crise sanitaire, les services juridictionnels du tribunal de Paris ont été significativement réduits ;

– Toutes les audiences programmées sont supprimées ;

– Les délibérés prévus à compter du mardi 17 mars 2020 sont prorogés ;

– Aucun accueil téléphonique ni physique ne sera assuré ; 

– Les messages RPVA ne seront pas traités. 

Les audiences de référé déjà prévues sont annulées sine die (y compris pour les affaires fixées précédemment à l’entrée en vigueur du plan de continuation d’activité) et les délibérés sont tous prorogés.

Seules les urgences civiles absolues, référés et requêtes, sont traitées à compter du lundi 16 mars 2020 : pour ce faire, une permanence est établie de 10h00 à 13h00 au Tribunal de Paris.

SERVICES DU JUGE DE L’EXECUTION

Dans le cadre du plan de continuation du tribunal judiciaire de Paris, le service du juge de l’exécution (mobilier et immobilier) n’est pas concerné par ce plan, de sorte que, jusqu’à nouvel ordre :

– Toutes les audiences programmées sont supprimées ;

– Les parties seront reconvoquées par le greffe lorsque l’activité reprendra ;

– Les délibérés sont prorogés ;

– Les requêtes ne seront pas traitées, sauf l’exception prévue ci-après ;

– Aucun accueil téléphonique ni physique ne sera assuré ;

– Les messages RPVA ne seront pas traités.

Il convient de reporter les assignations devant le juge de l’exécution, tant en matière mobilière qu’en matière immobilière, à la seule exception des cas dans lesquels un délai de procédure doit être interrompu :

S’agissant du contentieux mobilier, quelques dates d’audience restent ouvertes sur e-juridictions, mais exclusivement en vue de la délivrance des assignations destinées à interrompre le délai prévu à l’article R. 211-11 du code des procédures civiles d’exécution pour contester une saisie-attribution.

En matière immobilière, quelques dates d’audience seront disponibles sur demande, mais exclusivement en vue de la délivrance des assignations destinées à la prorogation des commandements de payer valant saisie immobilière.  Les audiences correspondantes ne seront physiquement tenues que si d’ici-là, l’activité est revenue à la normale ; dans le cas contraire, les affaires placées seront renvoyées sans audience et les parties reconvoquées par le greffe à une date ultérieure.

POLE FAMILLE

Le tribunal judiciaire de Paris a adopté dans son plan de continuation d’activité les dispositions suivantes prises pour assurer l’activité du pôle famille laquelle sera réduite aux seules urgences :  

Toutes les audiences du pôle famille sont supprimées (audiences de cabinet, de mise en état et de plaidoirie des affaires familiales, chambre du conseil, état des personnes, tutelles mineurs, délégation et retrait d‘autorité parentale et délaissement parental).

Les dossiers qui devaient être examinés à ces audiences font tous l’objet d’un renvoi. Les parties seront informées dès que possible de la date de ce renvoi. Les délibérés prévus au cours de cette période sont tous prorogés à une date qui sera communiquée ultérieurement.          

A compter de ce jour, seules les requêtes urgentes des affaires familiales (exclusivement en matière d’ordonnances de protection, et de procédure accélérée au fond pour les enlèvements internationaux d’enfants) peuvent être traitées. En dehors de ces situations d’urgence, la permanence des affaires familiales ne délivre plus de date pour les assignations.

POLE CIVIL DE PROXIMITE

À la suite de l’activation du plan de continuation d’activités au tribunal judiciaire de Paris, les dispositions suivantes ont été prises :

Toutes les audiences du pôle civil de proximité sont supprimées (référé, déclarations au greffe, AUDONA, CivRSCP, ACR, surendettement, saisie des rémunérations). 

Les dossiers qui devaient être examinés à ces audiences ont tous fait l’objet d’un renvoi sur un rôle d’attente. Les parties seront informées dès que possible de la date de ce renvoi. Les délibérés prévus au cours de cette période sont tous prorogés à une date qui sera communiquée ultérieurement. 

En l’état, plus aucune date n’est donnée pour assigner, quelle que soit la nature du contentieux. 

Les requêtes déposées au SAUJ à destination du Pôle civil de proximité ne seront pas traitées, le greffe n’étant plus présent au tribunal et le magistrat désigné gérant les urgences à distance.

En cas d’absolue urgence (pour l’essentiel les contestations de funérailles), les avocats peuvent saisir le pôle d’une requête à fin d’assignation d’heure à heure.

Si l’absence de délivrance de date se heurte à une difficulté pour un délai procédural qui devrait expirer avant le 16 avril prochain (forclusion, prescription), les avocats peuvent, sur la même adresse mail, adresser une requête à fin d’obtenir une date déterminée au fond.  

Toutes les autres demandes qui n’entreront pas dans ce cadre d’urgence ne seront pas considérées comme saisissant la juridiction.

Pour ne pas faire courir le délai de péremption, le nécessaire sera fait au sein du pôle pour que soit mentionnée sur les dossiers la cause du renvoi et l’absence de diligences attendues des parties.  

LA COUR D’APPEL DE PARIS

La cour d’appel de Paris est fermée, sauf en ce qui concerne le traitement des contentieux essentiels : les audiences de la chambre des appels correctionnels concernant les prévenus détenus et de la chambre d’applications des peines pour la gestion des urgences ; les permanences du parquet général ; les référés en matière civile visant l’urgence ; les audiences de privation de liberté en matière civile (hospitalisation sous contrainte, rétention des étrangers); les audiences de la chambre de l’instruction pour le contentieux de la détention.

Le bâtonnier de l’Ordre des avocats au Barreau de Paris a demandé au Ministère de la justice de prendre des dispositions visant  à suspendre, à compter du 16 mars et jusqu’à la fin de la période de confinement, tous les délais de procédure prescrits à peine de caducité, irrecevabilité, péremption, forclusion ou prescription, ceci dans toutes les procédures civiles, pénales et administratives de première instance et d’appel qu’il s’agisse de diligences substantielles ou de délais prescrits en application des règles de procédure civile, pénale ou administrative. Aucune réponse n’a à ce jour été apportée de telle sorte que les délais procéduraux continuent de s’appliquer. Différentes ordonnances seraient néanmoins ont en cours d’élaboration et notamment une ordonnance relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période.    

LES JURIDICTIONS PRUD’HOMALES

Les audiences sont annulées jusqu’à nouvel ordre.

Les requêtes devant le conseil de prud’hommes peuvent toujours être envoyées par courrier.  

LES TRIBUNAUX DE COMMERCE

Tribunal de commerce de Paris : S’agissant du contentieux général, seules les affaires urgentes sont susceptibles d’être retenues. L’ouverture de nouvelles procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ne paraît pas, en principe, relever de l’urgence au regard des mesures annoncées par le gouvernement. Toutefois, les demandes de mandataire ad hoc (article L. 611-3 du code de commerce) peuvent relever de l’urgence, tout autant que les jugements statuant sur des plans de cession lorsque ceux-ci peuvent avoir une incidence significative sur l’emploi. Il reste également possible de déposer une déclaration de cessation des paiements de manière dématérialisée de manière à respecter l’obligation de la déposer dans un délai de 45 jours suivant la cessation des paiements.

Tribunal de commerce de Nanterre : Pour les affaires au fond : renvoi automatique à 8 semaines pour les affaires des audiences de la semaine du 16 au 20 mars (et à 6 semaines pour les affaires des semaines suivantes) Pour les référés : suspension des audiences, sauf référé́ d’heure à heure – toutes les affaires sont renvoyées par le greffe à 6 semaines

Me Xavier Chabeuf


25 mars 2020