Inopposabilité du forfait jours en l’absence d’autonomie du salarié


La Cour de Cassation rappelle à nouveau que la rémunération au forfait-jours suppose que le salarié, cadre ou non cadre, soit autonome dans ses fonctions. A défaut, le forfait-jours lui est inopposable et l’intéressé est réputé avoir été soumis à la durée légale du travail (35h hebdomadaires) et peut prétendre au règlement d’heures supplémentaires (Cass. Soc., 27 mars 2019, N° 17-31715).

Dans l’affaire qui a donné lieu à ce rappel, le salarié, employé en tant que « concepteur son événementiel » au sein de la société Euro Disney avait saisi la juridiction prud’homale pour obtenir un rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires et les congés payés afférents, une indemnité pour des repos compensateurs non pris, une indemnité pour travail dissimulé.

En principe la clause de rémunération au forfait-jours qu’il avait signé s’opposait à ces demandes.

Mais la Cour d’appel y fait cependant droit en relevant que les « conceptions audio des événements » étaient en fait traitées en amont par les commerciaux qui le cas échéant contactaient le salarié pour vérifier avec lui la faisabilité d’une proposition ou recueillir son avis de technicien, de sorte qu’il n’intervenait en réalité qu’en exécutant spécialisé sans la moindre autonomie artistique ou d’innovation technique, qu’il n’établissait ni ne préparait ou chiffrait les devis des événements, qu’il procédait à la mise en œuvre technique des aspects audio ce qui impliquait une coopération constante avec les autres corps de métiers intervenant sur ces événements (régisseur décor, régisseur, son, régisseur lumière…) et qu’il avait un responsable sur place.

Le pourvoi formé par l’employeur est rejeté, la Cour de Cassation ajoutant que les fonctions du salarié s’appliquaient à des événements dont les modalités étaient connues au préalable, que des plannings précis comportaient notamment les jours et tranches horaires dans lesquels devait être effectuée chacune des opérations à respecter afin que l’événement se déroulât bien et laissât la place au suivant ; qu’en conséquence, le salarié ne disposait pas d’une autonomie réelle dans l’organisation de son travail qui était en fait totalement organisé et imposé par l’employeur, et ne remplissait pas les conditions pour être soumis à une convention de forfait en jours.

Rappelons que le critère de l’autonomie n’est pas la seule condition que doit remplir le forfait jours pour être valable. Celui-ci doit, avant tout, être prévue par un accord collectif qui assure la garantie du respect des durées maximales de travail et des repos, journaliers et hebdomadaires, être stipulé dans un écrit auquel le salarié a donné son accord, et faire l’objet d’entretiens annuels portant sur l’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle du salarié (voir précédents posts sur ce blog).

Me Manuel Dambrin


18 juin 2019