Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front


Qui n’a pas rêvé un jour de trouver un trésor au fond de son jardin ? Ou de découvrir dans une maison nouvellement acquise un double-fond dans la cheminée, une trappe cachée dans la bibliothèque, et se découvrir riche soudainement, sans l’avoir mérité par la force de son travail ?

C’est ce qui est arrivé, dans un premier temps du moins, aux époux Y, qui ont acheté une maison que le vendeur, Monsieur V, avait hérité de ses parents.

Peu de temps après ladite acquisition, ils ont découvert des lingots d’or enterrés dans le jardin. Il y avait au moins 43 lingots qu’ils ont revendus pour la plupart sans dissimuler leur découverte (déclarée en toute bonne foi aux services de la police) et l’origine de cette soudaine fortune.

Les frères et sœurs du vendeur initial de la maison, cohéritiers de leurs parents, ont alors assigné les époux Y en restitution des lingots et en indemnisation.

En substance, les époux Y invoquaient la règle de l’article 716 du code de procédure civile selon laquelle « la propriété d’un trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds ».

Ils soutenaient qu’ils avaient régulièrement acquis le sol de la propriété, ainsi que son sous-sol où se trouvaient les lingots, dont ils étaient devenus propriétaires par la même occasion.

Ils se prévalaient aussi de la règle « en fait de meubles, la possession vaut titre » (article 2276 du code civil), dont ils déduisaient qu’ils n’avaient pas à prouver leur droit de propriété sur les lingots à partir du moment où ils étaient en leur possession.

Les consorts V, pour leur part, avançaient qu’ils ne pouvaient pas avoir vendu des lingots dont ils ignoraient l’existence et que ces lingots, dont il semblait prouvé qu’ils avaient été acquis par leurs grands-parents qui les avaient dissimulés un peu partout dans la propriété, leur appartenaient en qualité d’héritiers, par voie de succession.

La réponse de la Cour de cassation (Cass., 1ère civ., 6 juin 2018, n° 17-16.091) s’est située dans la droite ligne des décisions rendues en première instance et en appel, brisant les rêves des découvreurs de trésors :

« Celui qui découvre, par le pur effet du hasard, une chose cachée ou enfouie a nécessairement conscience, au moment de la découverte, qu’il n’est pas propriétaire de cette chose, et ne peut être considéré comme un possesseur de bonne foi ; que, par suite, il ne saurait se prévaloir des dispositions de l’article 2276 du code civil pour faire échec à l’action en revendication d’une chose ainsi découverte, dont il prétend qu’elle constitue un trésor au sens de l’article 716, alinéa 2, du même code ».

Les héritiers pouvaient donc librement rapporter la preuve qu’ils étaient propriétaires des biens trouvés.

Qui plus est, la Cour de cassation a rappelé que l’action des héritiers n’était pas susceptible de prescription, le droit de propriété étant imprescriptible (article 2227 du code civil).

Tant pis, il va falloir continuer de travailler pour gagner sa vie.

Me Xavier Chabeuf


01 octobre 2018