Vous avez un message !… personnel ou professionnel ?


Dans un récent arrêt du 5 septembre 2017 la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a condamné l’Etat Roumain dont les juridictions avaient approuvé le licenciement d’un salarié qui avait été licencié pour avoir utilisé internet au bureau à des fins personnelles en échangeant des messages personnels par le biais de Yahoo Messenger.

C’est l’occasion de rappeler les conditions dans lesquelles l’employeur peut surveiller l’émission ou la réception par le salarié d’e-mails personnels, à partir de l’ordinateur professionnel.

Le principe :  les mails personnels adressés et reçus par le salarié sur l’ordinateur professionnel sont présumés avoir un caractère professionnel, ce qui implique qu’ils sont à la disposition de l’employeur, qui peut les lire, même en dehors de la présence du collaborateur, et y trouver éventuellement un motif de sanction.

L’exception au principe : si ces e-mails sont clairement identifiés par le salarié comme « personnel » (concrètement cette mention « personnelle » sera indiquée dans la barre « objet » ou au début du message), alors ils sont réputés relever de la vie privée du salarié et l’employeur ne pourra pas les exploiter puisque, depuis l’arrêt Nikon du du 2 octobre 2001 (n°99-42.942), « le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée ».

De façon plus générale, l’employeur ne peut ouvrir les messages, dossiers ou fichiers identifiés dans leur titre comme « personnel », contenus sur le disque dur de l’ordinateur mis à sa disposition, qu’en ayant précédemment avisé le salarié (Cass. Soc. 17 juin 2009, n° 08-40.274).

La question se pose aussi de savoir quel est le sort des e-mails échangés depuis le lieu – et l’ordinateur – de travail mais avec une messagerie personnelle : ces échanges sont protégés par le secret des correspondances. La Cour de Cassation l’a rappelé dans un arrêt du 26 janvier 2016 selon lequel « Mais attendu qu’ayant constaté que les messages électroniques litigieux provenaient de la messagerie personnelle de la salariée distincte de la messagerie professionnelle dont celle-ci disposait pour les besoins de son activité, la cour d’appel en a exactement déduit que ces messages électroniques devaient être écartés des débats en ce que leur production en justice portait atteinte au secret des correspondances ».

Me Manuel DAMBRIN


17 octobre 2017