Travailler ou fumer, il faut choisir


Si la consommation de drogue en dehors du lieu et du temps de travail ne peut pas, en tant que telle, justifier un licenciement, ce dernier peut être justifié lorsque cette consommation a entrainé des répercutions sur le travail. En outre, l’employeur est habilité à procéder lui-même à un test urinaire de dépistage de drogue si cette faculté est prévue et encadrée par le règlement intérieur de l’entreprise.

Tels sont les enseignements à tirer de l’arrêt du 27 janvier 2021 rendu par la Cour d’Appel d’Amiens (n°19/04143).

Dans cette affaire, un manutentionnaire de la société Stokomani s’était présenté au travail dans un état laissant supposer la prise de cannabis. Il fût alors soumis à un test urinaire de dépistage immédiat de produits stupéfiants puis, le test s’étant avéré positif, licencié pour faute grave.

Le salarié contestait cette mesure en faisant valoir que le fait d’avoir consommé du cannabis la veille de sa prise de fonction, durant le week-end, soit dans le cadre de sa vie privée, n’était pas constitutif d’une faute ; il arguait en outre que le test de détection par voie urinaire est un acte de biologie médicale, soumis comme tel au code de la santé publique, et ne pouvant être mis en œuvre que par un médecin biologiste ; enfin, il soutenait que son licenciement était en réalité fondé sur une volonté préalable de le congédier, l’employeur ayant utilisé un stratagème ayant consisté à programmer un dépistage de manière déloyale avec une probabilité que le test soit positif, sa chef d’équipe ayant connaissance de sa consommation occasionnelle durant le week-end.

Tous ces arguments furent balayés.

La Cour d’appel a en effet constaté que le règlement intérieur encadrait cette mesure de dépistage (possibilité pour le salarié de se faire assister par un tiers appartenant au personnel de l’entreprise et d’exiger une contre-expertise par la médecine ou la gendarmerie). Se référant ensuite au code de la santé publique, la Cour d’appel a jugé que cet acte de dépistage n’était pas un examen de biologie médicale ; La cour a également pris soin de souligner que la nature des fonctions du salarié, amené à conduire des véhicules et engins de levage, justifiait le recours à ce test, dès lors que le salarié présentait des signes manifestes d’altération du comportement constatés par l’employeur ou son représentant. Enfin, les juges ont souligné que le salarié n’apportait pas d’éléments permettant de caractériser un complot le visant spécialement.

La faute grave était donc caractérisée et le licenciement, justifié.

Me Manuel Dambrin


30 septembre 2021