Quand l’inspecteur du travail est plus dangereux que la Covid-19


C’est une affaire de boulangerie dans laquelle l’inspecteur du travail avait prétendu constater des manquements en termes de santé et de sécurité des salariés au regard des risques liés au coronavirus.

Il avait saisi le juge en référé sur le fondement des dispositions générales du code du travail lui permettant de demander au juge d’ordonner toutes mesures propres à faire cesser un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique d’un travailleur mais la particularité de cette affaire est qu’il avait aussi fondé ses demandes sur les dispositions spécifiques du code concernant la prévention des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs exposés à des agents biologiques (articles L. 4421-1 et R.4421-1).

Ces textes visent les établissements dans lesquels la nature de l’activité peut conduire à exposer les travailleurs à des agents biologiques. D’après la doctrine du Ministère, il s’agit des professionnels systématiquement exposés au risque de contamination du virus du fait de la nature de leur activité habituelle (professionnels de santé et de secours) et des travailleurs dont les tâches impliquent des contacts de moins d’un mètre avec les personnels contaminés.

Or, s’il n’est pas contestable que le virus Covid-19 est un agent biologique pathogène, l’activité de boulangerie, ne compte pas parmi les activités pouvant conduire à exposer les travailleurs à de tels agents.

Aussi est-ce sans surprise que, dans une ordonnance de référé du 30 avril 2020 (RG 20/00365), le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence a rejeté ce fondement de la demande en précisant que la réglementation sur les agents biologiques n’a pas pour finalité de s’imposer à l’ensemble des commerces et activités professionnelles recevant du public en période de pandémie.

Mais le juge ne s’arrête pas là, une fois écarté l’application des dispositions sur la prévention des risques biologiques, il constate que les mesures de prévention appliquées par l’employeur sont suffisantes :

• Une distance d’un mètre au moins entre les salariés et la clientèle ;

• Un sens de circulation dans le magasin, conformément aux préconisations applicables dans la vente depuis la crise sanitaire ;

• Des salariés disposant de masques, de gel hydroalcoolique et de gants ainsi que d’une visière en plexiglas ;

• Une organisation de l’activité adaptée en termes d’horaires de travail ;

• Une procédure de paiement limitant les contacts de la main à la main ;

• Des consignes d’utilisation des équipements de protection individuelle, du lavage des mains et l’organisation du travail (notes de service, affiches) et sensibilisation à ces pratiques ;

En outre, la société justifiait de la mise à jour du document unique d’évaluation des risques et l’inspecteur n’avait pas précisé en quoi le document établi était insuffisant.

Me Manuel Dambrin


13 mai 2020