Discrimination commise par un tiers : l’employeur est responsable
Débiteur envers ses salariés d’une obligation de sécurité, l’employeur doit répondre non seulement des agissements discriminatoires commis par des membres de son personnel, mais également de ceux des personnes tierces à l’entreprise qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur ses salariés.
L’affaire présentait à juger le cas d’une salariée employée par une association (club de tennis) et qui avait été victime d’insultes à connotation sexiste (« sac à foutre ») et de jets de détritus (salade, frites, œufs frais) de la part des bénévoles à l’occasion d’une soirée organisée par l’employeur dans les cuisines du restaurant du club.
L’intéressée avait saisi le juge d’une demande de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier pour discrimination et violation par l’employeur de son obligation de sécurité.
Elle est déboutée par la Cour de Limoges : si les juges reconnaissent l’existence de la discrimination, ils refusent en revanche d’en faire peser la responsabilité sur l’employeur. Ils retiennent ainsi que les faits dénoncés ont été commis par des bénévoles de l’association qui apportaient leur aide en cuisine à l’occasion de la soirée mais qui ne se trouvaient pas sous la subordination hiérarchique de l’employeur. Selon les juges, la responsabilité de celui-ci ne pouvait donc pas être engagée à raison de faits fautifs commis envers sa salariée par des personnes avec lesquelles il n’était lié par aucun lien de préposition. Ils relèvent en outre que l’employeur n’est pas demeuré sans réaction à la suite de cet incident puisqu’il a fait procéder à une enquête interne tout en invitant son personnel à prendre toutes les précautions nécessaires dans leurs relations avec la victime.
Cette solution est censurée par la Cour de Cassation, qui retient la responsabilité de l’employeur en posant le principe que ce dernier, tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en cas de discrimination, doit répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés (Cour de cassation, Chambre sociale, 30 janvier 2019, 17-28.905).
Me Manuel Dambrin
04 mars 2019